La viande, qui peut arrêter ?
Les médecins sont formels, toute personne adulte et en bonne santé peut arrêter un régime carné sans crainte, dès lors qu’elle conserve au menu d’autres sources de protéines. Mais, le discours se nuance davantage pour certaines catégories de la population. On fait le point avec le Dr Arnaud Cocaul, médecin nutritionniste, et Isabelle de Vaugelas, diététicienne-nutritionniste. *Par Céline Roussel
1 – Feu vert pour les adultes en bonne santé et motivés !
Le régime végétarien non strict, qui exclut uniquement la viande de l’alimentation, mais pas le poisson, les œufs ou les laitages, peut convenir à toute personne qui ne rencontre pas de problèmes de santé. Aucun risque en effet de se retrouver en carence de protéines. En effet, 100 g de poisson fournissent la même quantité de protéines que 100 g de viande (soit 20 g), et 2 œufs en apportent 13 g. Les laitages et les oléagineux en fournissent aussi, en quantité moindre, mais c’est intéressant en guise de complément. “Concernant le fer, les œufs, les poissons et les fruits de mer en concentrent, comme la viande, de même que certains végétaux (les légumineuses en tête), même si le fer végétal est un peu moins assimilé que le fer animal (ou héminique)”, rassure le Dr Arnaud Cocaul, médecin nutritionniste. “Il faudra juste assumer ce choix et braver le jugement des autres ! Car en France, la gastronomie, c’est sacré ! Et, la viande y occupe une place encore majeure”, observe Isabelle de Vaugelas, diététicienne-nutritionniste.
2 – Chez les enfants, rien ne presse !
Durant la croissance, pour un bon développement physique et neurologique, les enfants ont besoin de protéines, de calcium, de fer, de vitamine B12, tous les éléments nutritifs contenus dans les produits d’origine animale (viande, produits laitiers). “En grandissant, les besoins des enfants en protéines et en fer vont bien sûr augmenter. Il n’est donc pas pertinent de leur enlever la viande, qui en contient beaucoup. Pour eux, l’idéal reste le régime flexitarien, incluant la viande deux à trois fois par semaine environ. Cependant, si un enfant manifeste l’envie de stopper la viande, ses parents doivent l’écouter, en discuter, et s’ils décident de suivre sa volonté, ils devront veiller à rééquilibrer ses apports en protéines et en fer”, recommande le médecin.
3 – Pour les femmes, avec vigilance ;
Chez les femmes en âge de procréer, et dès l’adolescence, les besoins en fer sont importants (16 mg par jour en moyenne) compte tenu de leurs périodes de règles. Elles peuvent toutefois arrêter de manger de la viande, car le poisson, les œufs, les fruits de mer et les légumineuses pourront combler leurs besoins en fer. Pourtant, une surveillance du taux de ce minéral semble indispensable. “Il faut toutefois être attentif à ce type de décision chez les adolescentes, chez qui l’on observe une obsession de la minceur. Chez certaines, cela sonne parfois comme le début d’un trouble alimentaire, comme l’anorexie. Elles éliminent une famille d’aliments, puis une autre, jusqu’à parvenir à des portions minuscules”, note le Dr Cocaul. Pour les femmes enceintes et allaitantes qui ont des besoins aussi élevés en fer, pour assurer le bon développement du fœtus puis du bébé, idem, une bonne surveillance du taux de fer est préconisée pour celles qui font malgré tout le choix de stopper toute consommation de viande.*
4 – chez les séniors, on évite
Beaucoup de personnes âgées réduisent spontanément leur consommation de viande et bien souvent cela n’a rien à voir avec une prise de conscience écologique. “C’est juste que la viande devient plus difficile à manger passé un certain âge en raison de problèmes dentaires, de préhension pour tenir un couteau ou de perte de goût. Or, les seniors ont des besoins en protéines élevés, de l’ordre de 1,2 g de protéines par kilo de poids. S’ils n’ont pas leur compte, ils peuvent rapidement perdre du poids. Cela peut entraîner une fonte musculaire et des pertes d’équilibre. Il ne me semble donc pas pertinent de chercher à supprimer la viande à cet-âge-là. La consommation de viande, deux à trois par semaine, en alternance avec les poissons et les œufs, parais le meilleur rythme”, conseille le médecin.
5 – Chez les personnes malades, au cas par cas ;
“Tout dépend de la pathologie. Les personnes qui souffrent de diabète, de maladies cardio-vasculaires ou de surpoids ont tout intérêt à éviter la viande rouge et même la viande tout court. Cela réduira leur consommation d’acides gras saturés, qui ont une grande part de responsabilité dans leur pathologie”, analyse le Dr Cocaul.
Pour tout autre problème de santé, seul un avis médical pourra trancher en faveur d’un arrêt total de la viande ou pas.